Déployé en étoile autour de Carhaix, le réseau ferré breton a eu une forte influence sur la ville. Tout au long de l’histoire du réseau, créé à la fin du 19e siècle, démantelé en 1967. Les chemins de fer ont progressivement desservi la Bretagne. Au gros maillage formé d’abord par les lignes desservant Brest ou Quimper, il a fallu ajouter des réseaux secondaires, notamment pour irriguer le centre Bretagne. C’est la Compagnie de l’Ouest qui a obtenu en 1883 la concession pour la réalisation des travaux. Cette Compagnie n’ayant pas les moyens d’exploiter un tel réseau, en confia l’exploitation, par convention du 05 mars 1886, à la Compagnie Générale des Chemins de Fer économiques. La première ligne, reliant Morlaix depuis Carhaix fut inaugurée en 1891, et forme la première des cinq branches de la fameuse « étoile de fer » qui dessine peu à peu le réseau breton, étendu jusqu’en 1925, pour constituer, avec 427 km de voies, un des plus importants réseau de France à voie métrique. Les trains pouvaient rallier la banlieue de Rennes (La Brohinère), jusqu’à Camaret. L’exploitation du Réseau Breton a été concédée à la Société générale des chemins de fer économiques, rebaptisée CFTA dans les années 60, l’ancêtre de Transdev Rail. Pour des raisons économiques en effet, le choix a été fait d’un écartement des voies plus étroit, d’un mètre, que l’écartement standard des voies en France (1,435 mètre).
« Cela coûtait moins cher à déployer, avec moins d’emprise foncière au sol, moins de matériaux demandés », explique Ernest Manac’h, aujourd’hui jeune retraité de la CFTA, et président de l’Association des Amis du réseau breton.
Les voies métriques peuvent aussi se faufiler plus facilement dans le paysage, permettant des rayons de courbures plus réduits, et évite la construction de coûteux ouvrages d’art en cas d’obstacle. Le réseau transporte des voyageurs et des marchandises, au plus près des besoins du territoire. Et c’est à Carhaix que bat son cœur, à la gare et dans ses ateliers, où est assurée toute la maintenance du matériel roulant du réseau. La gare de Carhaix est alors la plus grande gare en France à voie métrique. Au plus fort de l’activité du réseau breton, elle compte près d’une trentaine de voies, pas moins de 70 aiguillages, pour orienter les trains notamment vers les travées des ateliers. Devant chaque travée, une à deux locomotives stationnent, pour l’entretien desquelles s’activent des forgerons, des chaudronniers, des soudeurs, des électriciens, aux ateliers
En 1945, 725 agents travaillaient sur le Réseau Breton dont plus de la moitié en résidence à Carhaix », recense Ernest Manac’h
Faisant du réseau l’un des principaux employeurs industriels à Carhaix. L’arrivée du train via le réseau breton a considérablement redynamisé la ville à la fin du 19e siècle. Des quartiers autour de la gare – rue du Maroc, rue Pierre Sémard – sont construits, pour accueillir les cheminots et leurs familles. Outre sa physionomie, la sociologie de la ville aussi est modifiée, les cheminots, épris de justice sociale, étant parmi les plus organisés et syndiqués des ouvriers. La Bretagne a été desservie par d’autres réseaux secondaires à voie métrique, comme celui des chemins de fer départementaux du Finistère, ou celui des Côtes-du-Nord, le Réseau Armoricain. Plus petits, ils ont aussi duré moins longtemps. L’essor du transport routier, surtout, aura finalement raison du réseau breton également. De son tracé originel ne subsiste plus aujourd’hui que la ligne Carhaix-Guingamp-Paimpol, convertie en voie standard
Sur les autres lignes déclassées, on trouve des portions réaménagées en voies vertes – pistes cyclables ou chemins de randonnée. C’est aussi sur une ancienne portion de la ligne Carhaix – Loudéac, entre Gouarec et Saint-Gelven, près de l’ancienne abbaye cistercienne, que Christian Labetouille a ouvert le chemin de fer de Bon-Repos, pour promener les visiteurs sur quatre kilomètres au milieu de la verdure. Christian Labetouille dit lui aussi avoir toujours eu envie de « faire revivre ce réseau qui a façonné la Bretagne. Redonner vie aux ateliers, c’est emblématique, parce que c’était le cœur du réseau », se réjouit-il aujourd’hui.